Ivan Cappelen et la tentation de l'anticléricalisme primaire.
Hier soir se tenait un débat entre le Président du Conseil sortant Ivan Cappelen, et la sénatrice Kirsten Sullivan-Pettersen, tête de liste de l'Alliance de la Droite Populaire pour les élections sénatoriales. Dès sa première prise de parole, le Président du Conseil, qui semble considérer que les électeurs constantins ne sont pas dignes de placer un bulletin communiste dans l'urne, affirme que la religion "ne doit pas être considérée comme universellement vraie". Cette affirmation, qui semble peu correspondre à l'avis d'une majorité de Saphyriens, peut être comprise. Beaucoup de constantins ont des doutes. Le problème étant qu'Ivan Cappelen n'est pas constantin mais athée. Il est d'ailleurs dans son bon droit et il convient à tous de respecter cette croyance. Cependant, l’État n'a pas à être athée, sauf si tous les Saphyriens étaient athées, ce qui est très loin d'être le cas. L’État n'était d'ailleurs pas avant les réformes du Conseil Impérial un État constantin, mais un État qui rendait plus simple la pratique d'un culte majoritaire, en entretenant les bâtiments religieux et en permettant aux prêtres, dont l'activité est non-lucrative (et donc plus proche du communisme que du capitalisme, d'ailleurs) de vivre dignement.
La Foi constantine n'était imposée à personne. La preuve est qu'il y a aujourd'hui dans notre pays de nombreuses personnes qui ont d'autres croyances, ou qui n'en ont pas. Cette volonté d'imposer l'athéisme s'inscrit dans une longue tradition de républicains. Beaucoup de pays républicains sont devenus laïcs. On pourrait faire le lien avec la volonté de déstabiliser l'Empire lors du premier mandat du Président Cappelen mais malheureusement, ce dernier souhaite imposer un l'athéisme. La laïcité aurait peut-être été un pallier moins violent pour commencer ? Si le Président du Conseil avait été moins gourmand en mesures électoralistes, il n'aurait pas coupé les vivres à l’Église, qui a d'ailleurs réussi à survivre, argument que brandit Ivan Cappelen.
Saphyr Constantin a cependant contacté le Patriarcat et le constat est sans appel. "Nous avons été obligés de faire des économies partout" confiait un membre du conseil économique de l’Église constantine. Les premières victimes ? "Les migrants et les sans-abris, dont les centres d'hébergement gérés par l’Église n'ont pas pu tous survivre" dénonce un prêtre responsable de l'action sociale.
Au travers une réforme mise en place pour draguer les électeurs de gauche dure, qui sont bien souvent opposés à l’Église pour des raisons inconnues, le Président du Conseil devient ainsi officiellement le premier Président du Conseil Impérial ouvertement anticlérical. Paradoxal quand on connaît un minimum les priorités des électeurs de gauche et de l’Église : l'aide aux migrants et les logements pour tous. La gauche a cependant aussi une autre priorité et se met donc en position défavorable pour les constantins. Les réformes engagées par le Conseil n'ont en effet pas plu aux fidèles constantins, comme le mariage homosexuel. Les débats avaient été houleux entre les fidèles, dont certains étaient favorables à cette réforme. Le Patriarche avait lui-même tranché : "si deux hommes ou deux femmes veulent former un couple, c'est leur problème et nous n'avons pas le droit de les exclure de la société. La question de la famille est pourtant essentielle et le détricotage de cette famille me semble être la prochaine étape et l’Église s'y oppose fondamentalement". Björn Lindström a-t-il vu juste ?
La rhétorique du radicalisme constantin a fait doucement rire les spécialistes de la religion, lorsqu'ils écoutaient hier le débat. Bien qu'on ne peut nier l'existence de communautés traditionalistes dans tout le pays, il parait exagéré de dire que le radicalisme constantin fait tant de victimes, en comparaison avec le radicalisme eibadiste, qui a déjà fait des morts sur le territoire saphyrien. La pratique libre de la religion est essentielle tout comme la lutte contre les radicalismes, qui doivent être combattus sans que les mesures ne stigmatisent les croyants ni ne les empêchent de pratiquer leur culte. Quand on sait que pour lutter contre le radicalisme, la loi met en place l'obligation d'autorisation pour faire sonner les cloches, on est surpris que des constantins votent encore communiste.
Interdiction des cloches dans certaines villes, séparation brutale (et sans négociations, ce que "regrette" le Patriarcat), fin de l'enseignement confessionnel et tant d'autres mesures controversées s'inscrivent dans une politique profondément anticléricale. La question que nous pourrions nous poser est pourquoi ? Il est facilement imaginable que le Président du Conseil trouve plaisant de voir l’Église en difficulté financière mais la diabolisation n'est pas la solution dans ce débat, d'ailleurs, il se diabolise déjà lui-même auprès d'une majorité de constantins en usant de stéréotypes que même les militants anarchistes n'utilisent pas et en traitant notamment la pratique du culte de "tradition médiévale".
Mais alors que veulent les constantins ? Premièrement, il semble évident que des négociations sont à entamer rapidement pour le financement de l’Église et notamment pour qu'elle puisse continuer son œuvre caritative essentielle pour de nombreux saphyriens. Il faudra ensuite que la pratique du culte soit rendue plus simple. Finie l'interdiction de faire sonner les cloches sans autorisation, mesure aussi inutile qu'absurde. Et surtout, une revendication importante, c'est de mettre fin au véritable vol qui a été fait à l'enseignement privé. La liberté, qui semble si importante aux yeux d'Ivan Cappelen doit aussi profiter aux parents constantins et à leurs enfants. De quel droit devrait-il décider de la manière dont les parents élèvent leurs enfants ? Bref, il est temps d'agir en faveur des constantins. Espérons que le prochain Conseil saura répondre à leurs attentes.
Erick Rogstad